Discussion
Seront discutées
linterprétation des résultats, linformation
des étudiants et les actions à envisager.
I, Interprétation
des résultats
Après
avoir discuté la validité de lenquête
et sa confrontation avec la littérature, on insistera
sur les singularités de D 3, les inégalités
entre années, leffondrement de la disponibilité
pour étudier et les besoins affectifs des étudiants.
A, Validité
de lenquête
Les taux de
réponses a été de 24%, 30%, 9% et 22%.
Les étudiants en D 3 nont guère
bénéficié de nos relances verbales
par suite de leur absentéisme. Ceux que nous avons
interrogés ultérieurement ont mis en avant
la longueur du questionnaire, leurs doutes sur son anonymat,
la nécessité de le ramener à la Faculté.
Aucune de ces objections nest spécifique à
D 3. Les répondeurs de D 3 qui ont vécu
en compagnie avec un suicidant, un alcoolique ou un malade
mental dépassent le double de ce quils sont
dans les autres années : les étudiants
à problèmes auraient ainsi répondu
plus volontiers que les autres. Toutefois, les réponses
rétrospectives des étudiants de D 5 au
sujet de D 3 concordaient avec celles issues des D 3.
B, Confrontation
avec la littérature
Les enquêtes
ont été très rares, hormis celles du
CREDOC et de lIREDU 1975, et de JD Raynaud et
Alain Touraine 1956. Celle-ci remontait à une époque
où les bacheliers de la série A (latin-grec)
réussissaient à lexternat bien mieux
que ceux de la série C (mathématiques-physique)
et où les sociologues classaient les réponses
par rangs et non en pourcentages.
Elle ne visait
pas les variations des étudiants au fil des ans.
Les taux du travail rémunéré et du
logis indépendant étaient peu différents
à lépoque, excepté que les cités
universitaires et maisons détudiants jouaient
un rôle notable. Les étudiants mariés
étaient 17% contre 26% en 1976. Les boursiers étaient
33% contre 9% mais les boursiers complets nétaient
quun tiers contre deux tiers. Lexercice libéral
exclusif attirait les trois-quarts des étudiants
contre 39%.
C, La dépolarisation
en D 3
Cette métaphore
exprime la brusquerie des changements et le fait quils
redeviennent polar en D 4. Ces singularités
pourraient sexpliquer par des facteurs antérieurs,
contemporains et ultérieurs à D 3.
Antérieurement à cette cinquième année
détudes, beaucoup de besoins affectifs ont
été ignorés ou refoulés. Il
est plausible quils explosent.
Contemporains de D 3, quatre facteurs nous apparaissent
importants :
- les étudiants touchent leurs premières payes
dexternes: leviers dans leurs dépenses de temps
et dargent, peut-être au-delà de leurs
moyens ;
- « Enfin nous sommes considérés
comme quelquun
Nous nous sentons des ailes ! »
«
pour courir tous les lièvres ! »
ajouteraient certains ;
- beaucoup renoncent à leffort de linternat :
« Alors, pépère
»
- tous constatent que la Faculté a mal rempli son
contrat cest-à-dire quils ne seront pas
prêts à être médecins à
la fin de leurs études. Certains se mettent-ils à
suivre cet exemple ?
Ultérieurement à
D 3, ils savent que les programme de D 4 sera
très lourd. Certains veulent-ils souffler ou avancer
leurs affaires sentimentales avant lhivernage en
D 4 et la dispersion en D 5 ?
D, Les inégalités
entre années
Les inégalités
dans la lourdeur des programmes et dans lintérêt
des matières sont évidentes.
Les réponses paraissent sous-estimer linégalité
des performances aux examens et de lefficacité
dans le labeur détude.
Successivement à Necker-Enfants-malades
puis à Broussais-Hôtel-Dieu, lun de nous
a été frappé par la bonne qualité
des copies de sémiologie médicale en D 1
et la médiocrité des copies de gastro-entérologie
en D 3 ou D 4, différence peu
apparente au vu des notes décernées.
Labsentéisme
devenait massif à partir de D 3, aux amphis
comme aux enseignements dirigés, les enseignants
restant les mêmes. Certes, les étudiants se
déclaraient plus habiles pour sorganiser mais
certaines réponses des dernières années
sont révélatrices : un tiers dentre
eux sont moins en forme que lannée précédente
pour attaquer le travail et un tiers narrive plus
à se concentrer aussi longtemps que lannée
précédente. Trop de centres dintérêt
les happent, comme le révèle leur emploi du
temps, notamment après dîner. Cest corroboré
par lenquête du CREDOC.
Ainsi, une année
négale pas une année, notamment
dans la disponibilité pour étudier. Il
semble illusoire dattendre de létudiant
un travail détude important plus de quatre
ans après le baccalauréat.
E, Les besoins affectifs
des étudiants
Ces besoins éclatent
dans leurs réponses sur leur orientation et leur
conception de la réussite, leurs craintes dabandon
et leurs attitudes concernant les débouchés,
la sélection, largent. De même, dans
leur appétence pour diverses satisfactions, consommations
et compensations (véhicule, logis, loisirs). Des
commentaires libres fustigent linsuffisance de camaraderie
dans la vie de Faculté et certaines attitudes ressenties
comme méprisantes. Différent de lhomo
economicus, lhomo estudiantinus (ou studens) nest
ni mû exclusivement par des choix rationnels, ni stable
dans ses comportements.
Bien entendu, on ne demande ni aux responsables de lenseignement,
ni aux contribuables qui le financent en partie, de simaginer
capables de satisfaire les besoins affectifs des étudiants.
Ces besoins seront-ils jamais satisfaits ? Toutefois,
on se tromperait en agissant comme sils nexistaient
pas. Il en va de même des médecins envers
leurs malades. Lhumanisation pourrait être un
thème daction pour luniversité.
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